Sénégal : Rapport Cour des comptes sur les fonds Force Covid-19, le Procureur annonce avoir confié le dossier la Dic
Le procureur de la République près le Tribunal de Dakar, Amadou Diouf, a annoncé dans un communiqué publié ce lundi 06 février 2023, avoir confié le dossier du Rapport Cour des comptes sur les fonds Force Covid-19 à la Division des investigations criminelles (Dic) pour des enquêtes préliminaires.
Le Ministère public informe qu’à la suite de la saisine du Garde des sceaux, Ministre de la justice, par la Cour des comptes, le parquet de céans a été subséquemment destinataire du rapport définitif de cette cour portant contrôle de la Gestion du Fonds de Riposte et de Solidarité contre les effets de la COVID- Gestion 2020-2021, audit dont la mission consistait à passer en revue et à vérifier, au-delà des actes de gestion, si les ressources mobilisées ont été utilisées conformément à la réglementation en vigueur et aux principes de bonne gestion..
Ledit rapport qui se fonde sur les pouvoirs et les compétences de la cour tels qu’il résulte de la loi organique 2012-23 du 27 décembre 2012 sur la Cour des comptes a fait des recommandations tendant à l’ouverture de poursuites judiciaires à l’encontre de personnes nommément désignées auxquelles la cour impute un ensemble de manquements tenant- entre autres fautes- à des violations manifestes du Code des Marchés publics, nonobstant les dérogations contextuelles prévues, des ouvertures de comptes bancaires sans autorisation du Ministre des Finances et contraires à la réglementation régissant les banques et établissements financiers, des surfacturations sur les prix, des paiements en espèce supérieurs aux montants autorisés, des dépenses non justifiées et des soustractions, détournements et actes de blanchiment de capitaux. La cour dans le cadre de ses avertissements soulignait par ailleurs que les faits relates dans le rapport définitif sont « présumés constitutifs de fautes de gestion ou d’infractions pénales…».
A ce titre, Il importe de rappeler que douze (12) recommandations tendant à l’ouverture d’une information judiciaire ont été adressées au Garde des Sceaux, Ministre de la Justice:
L’analyse des informations contenues dans le rapport faisant présumer de potentielles violations de la loi et l’existence d’infractions pénales notamment des atteintes aux deniers publics et autres infractions assimilées telles la corruption et l’abus de fonction, j’ai demandé aux unités de la police judiciaire de la Division des Investigations Criminelles, dans le respect des principes directeurs de la procédure pénale et les droits des mis en cause d’ouvrir, conformément aux dispositions des articles 67 et suivants du CPP, des enquêtes préliminaires aux fins de constater la matérialité des faits dénoncés, d’en rassembler les preuves, d’élucider les circonstances qui ont entouré les actes sus évoqués et d’identifier.
s’il y a lieu, l’ensemble des auteurs et des personnes qui ont facilité ou aidé à la commission des faits ou profité d’une manière ou d’une autre des produits du crime. Ces enquêtes au regard de la gravité des faits dénoncés et de la nature des fonds en question devront être débutées sans délai et conduites avec célérité ainsi qu’une grande rigueur aussi bien professionnelle que procédurale.
Il convient de souligner que ces enquêtes que j’ai décidé de faire engager, justifiées par les dispositions des articles 32 et suivants du Code de procédure pénale, revêtent au vu de ce qui précède une importance capitale en tant qu’elles permettent à terme de sanctionner et de dissuader des faits qui sont d’autant plus graves qu’ils perturbent gravement l’ordre public économique et l’ordre public de manière générale. De plus, les actes dénoncés qui marquent de fortes suspicions de captation de ressources par des fonctionnaires censés servir l’intérêt public défigurent et sapent les efforts de l’Etat dans ses initiatives tendant à offrir des services de base (eau, santé, assainissement, éducation, etc.) aux couches les plus vulnérables de la société outre qu’ils diminuent nos capacités communes à promouvoir des politiques publiques efficientes en plus d’annihiler la confiance que les populations doivent nourrir dans un cadre républicain- à l’endroit des institutions publiques.
C’est pourquoi, conformément aux engagements internationaux et régionaux que le pays a souscrit à travers particulièrement la Convention des Nations Unies contre la Corruption adoptée à Mérida (Mexique) le 09 décembre 2003, la Convention de l’Union africaine sur la Prévention et la Lutte contre la Corruption adoptée à Maputo (Mozambique) le 11 juillet 2003 et le Protocole AP/P3/12/01/ de la CEDEAO portant sur la Lutte contre la Corruption adopté à Dakar, le 21 décembre 2001, j’ai demandé aux officiers de police judicaire de me signaler à l’issue des enquêtes toute personne dont la responsabilité peut être engagée de façon indiscutable pour une quelconque infraction en rapport avec les faits dénoncés, lesquelles personnes seront rigoureusement traduites devant les juridictions et punies conformément à la loi. Ces instruments sus évoquées invitent les Etats Parties à ouvrir des enquêtes pour tous les actes de corruption d’agent public ou du secteur privé et pour les infractions qui leur sont assimilées notamment, le détournement, la soustraction, le vol, le recel de deniers publics, la surfacturation, le trafic d’influence et le blanchiment de capitaux.
De plus, et dans le même esprit, des enquêtes de patrimoine devraient être judicieusement engagées par les enquêteurs dans le sens de faciliter le recouvrement des avoirs et de tracer au besoin les produits du crime dès lors qu’il est établi que les ressources du Fonds de riposte proviennent des réajustements du budget de l’Etat, de contributions volontaires motivées par l’élan de solidarité des citoyens et du concours des partenaires techniques et financiers.
Fait au parquet le 06/02/2023
Le Procureur de la République